sans masque
Quand on est, comme je l’ai ete, temoin d’une grande souffrance tant physique que morale, et pendant si longtemps, on n’en sort pas indemme. Cela nous renvoit a notre propre fragilite, a notre propre finitude. J'ai accueilli cette souffrance et je me suis ouverte aux questions qu’elle soulevait. J’ai regarde Debbie se debattre entre la douleur, le desespoir et la peur. Je l’ai vue peu a peu se depouiller de tout le superflu qui encombre nos vies. Je ne trouve pas les mots…
Dans les dernieres semaines qui ont precede sa mort tout l’inutile avait disparu. Tout ce qu’elle avait garde etait essentiel. L’amour, le respect, la compassion. Economie dans ses gestes, dans ses propos. Verite dans ses regards. Humilite dans ses demandes. Elle se montrait telle qu’elle etait, sans tricher, sans jouer. Toute sa vie a ete cela : se depouiller. Depuis ses annees d’adolescente fiere et orgueilleuse, jusqu'a ce jour ou humblement elle m’a laissee l’aider a s’essuyer, simplement parce qu’elle ne pouvait plus le faire toute seule. C’est cela que j’admire, cette humilite. Cette humilite qu’elle a d’abord choisie, au faite de sa beaute. Cette humilite qu’elle a ensuite acceptee aux heures les plus dures de sa souffrance. Elle etait digne, et humble. Quelle lecon ! Je l’ai regardee vivre, et se battre, et souffrir. Et j’ai compris que j’avais encore beaucoup a apprendre. Que moi aussi il me fallait me depouiller. Non pas parce que Debbie l’avait fait. Mais parce que c’est mon chemin.
Je me suis construite en ajoutant des couches et des couches censees me rendre plus intelligente, plus drole, plus attractive, plus attachante, plus performante, plus…
Je veux vieillir en enlevant ces couches. Je ne veux plus etre "plus". Je veux etre moi, me montrer telle que je suis, et m’accepter ainsi. Je veux pouvoir dire la verite, je veux pouvoir l’entendre. Je veux, a l’heure de mourir, me trouver aussi nue que lorsque je suis nee. Sans appret, sans masque, nue telle que Dieu m’a faite.
Je veux vieillir en enlevant ces couches. Je ne veux plus etre "plus". Je veux etre moi, me montrer telle que je suis, et m’accepter ainsi. Je veux pouvoir dire la verite, je veux pouvoir l’entendre. Je veux, a l’heure de mourir, me trouver aussi nue que lorsque je suis nee. Sans appret, sans masque, nue telle que Dieu m’a faite.
4 commentaires:
Ma Yanaï, ce qui me frappe dans ce que tu écris, c'est que la grande humilité de Debbie vient du fait, me semble-t-il à travers tes mots, qu'elle a non seulement choisi de ne pas se dérober à ce qui lui arrivait mais qu'elle a même, incroyable liberté, acquiescé à cela.
J'ai le sentiment qu'on ne peut pas se dépouiller soi-même, mais qu'on peut acquiescer à un dépouillement qui, au départ, s'impose à nous.
Personnellement, je ne cherche pas le dépouillement mais, depuis peu, je ne le fuis plus systématiquement, et, parfois, il m'arrive de le choisir. Mais tout cela est si fragile, si fragile...
J'entends fort ton désir d'accomplissement de toi-même. Et je m'étonne, moi qui te trouve déjà si "aboutie" !
Quels sont donc les chemins qui vont s'ouvrir à toi, vers davantage de profondeur, d'intériorité, d'intimité, et d'engendrement ?
Je m'arrête de parler maintenant, Yanaï, pour t'accueillir en silence, paisiblement.
Je t'embrasse.
NicO
PS Je suis touché que tu ais mis dans le profile notre échange. Merci.
Si, on peut se depouiller soi-meme.
Cela commence par la prise de conscience du temps qu'on passe a se faire beau/belle, du soin qu'on apporte a son apparence, des bijoux, du maquillage, des chemises, des chaussures, des parfums...
Cela passe par la prise de conscience des attitudes affectees que l'on a, comment on veut briller en societe, comment on veut etre percu, quel pouvoir on a...
Et puis vient le temps ou ce n'est plus nous qui decidons. La vie nous y contraint. On accepte ou pas. C'est le temps de la maladie, ou celui de la vieillesse parfois...
Debbie a pris conscience de sa vanite vers l'age de 20 ans. Elle n'a depuis cesse de travailler a etre une humble enfant de Dieu. Je sais qu'elle a choisi, voulu se depouiller, se debarrasser de tout ce superflu. Et puis peu avant ses 40 ans elle est tombee malade. Et la maladie a eu raison de ses derniers sursauts d'orgueil.
Elle n'a pas acquiesce, elle n'a pas consenti. Elle a, petit bout par petit bout, rogne ce vieil orgueil qui ne voulait pas ceder. Elle s'est battue contre elle meme, elle a voulu redevenir toute petite et toute humble. C'est cela qui est admirable. Cette lutte a laquelle elle ne s'est pas derobee. Ce n'etait pas une sainte, elle disait toujours non avant de dire oui. Et c'est parce qu'elle a lutte qu'elle m'est proche. Parce qu'elle a fini par accepter de se departir a ce point de tout orgueil que je l'admire. Pour autant elle n'a pas accepte de mourir, et elle n'est pas morte en paix. Mais c'est une autre histoire...
Elle me manque tellement, si tu savais...
Je vais me coucher, je suis emue et fatiguee.
Bonne nuit mon NicO.
J'ai répondu à NicO avant de lire ta note mais bis repetita.
Comme toi, j'ai accumulé les couches, j'ai cherché les regards, pour briller, paraître. Pour un jour y mettre un terme, un mauvais terme car la solitude dans laquelle je me réfugiais était stérile. Elle était stérile car inhabitée. Je disais non. Mais le non n'a de sens que pour le oui qu'il annonce. Alors aujourd'hui j'apprends le oui. Un oui sans calculs et sans effets. Je ne sais pas encore où je vais mais j'y vais. Et je me dis que pour voyager loin, il vaut mieux voyager léger. Je m'éfeuille sans craindre la nudité. Voilà petite Yanaï, je suis comme toi, comme NicO. A la recherche d'un soleil qui m'attire et me fera naître. Je suis bourgeon.
Looks nice! Awesome content. Good job guys.
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